Face à la montée des pressions environnementales et à l’institutionnalisation du concept d’entreprise responsable (Browaeys L., 2020 ; Lépineux et al., 2016 ; Capron et Quairel-Lanoizelee, 2016), la compréhension des processus de décision relatifs à la mise en œuvre des investissements environnementaux devient un enjeu essentiel pour les organisations elles-mêmes, afin de les aider à mieux gérer leurs investissements environnementaux (éco-conception, économie circulaire, gestion des déchets, diminution des émissions de gaz à effet de serre…), mais aussi pour les parties prenantes, les collectivités territoriales et les autorités publiques.
Quels critères d’évaluation ?
Au-delà des enjeux financiers (coûts directs et indirects associés aux cycles des activités), il s’agit de mieux appréhender les processus de décision associés à un type d’investissement difficilement cernable par les outils classiques d’aide à la décision. En effet, comme l’ont souligné de nombreux travaux, l’évaluation d’un projet d’investissement environnemental est complexe du fait des relations indirectes et non mesurables entre ce type d’investissement et la performance économique, stratégique et financière.
Plusieurs recherches proposent ainsi une approche multicritère qui mesure notamment l’impact de ces investissements en termes d’image (comportement éthique, transparence), de relation avec les parties prenantes (dialogue, communication, engagements sociétaux), d’anticipation de contraintes réglementaires (principe de légalité et des normes internationales de comportement), d’opportunités commerciales futures. De nombreux auteurs ont ainsi cherché à mesurer l’impact des investissements environnementaux sur la compétitivité des organisations (développement durable et création de valeur).
Quelle motivations ?
Cependant, au-delà de la mesure ex post de la performance d’un investissement environnemental, l’enjeu se situe aussi ex ante dans la capacité des acteurs à prendre ce type de décision dans le jeu organisationnel existant et à le justifier tant en interne qu’en externe . La question du ou des processus de décision et de leur optimisation dans le cas d’un investissement environnemental se pose d’autant plus que l’attitude a priori des entreprises face à l’environnement n’est pas homogène. Ainsi, Louppe et Rocaboy (1994) identifient cinq attitudes (postures) types : hostile (négation des problèmes environnementaux), défensive (reconnaissance de pressions/menaces environnementales), bienveillante (acceptation des revendications environnementales), coopératrice (volonté de s’impliquer dans la maîtrise des impacts environnementaux) et enfin intégratrice (transformation de la donne environnementale en avantage concurrentiel : innovation, économies de coûts, différenciation).
Au-delà de la posture a priori des organisations, il a été montré que la décision de réaliser un investissement environnemental s’explique en partie par une diversité de motivations (économiques, écologiques, éthiques, stratégiques et sociétales) qui rendent d’autant plus complexes les processus de décision (Bansal et Roth, 2000). De même, les recherches sur les freins et blocages de la décision d’investir dans l’environnement mettent en exergue des difficultés liées au manque d’information, à l’existence de résistances aux changements organisationnels et à la trop grande diversité des solutions techniques qui engendre parfois une forme d’immobilisme.
Références
Bansal, P. et Roth, K. (2000), « Why companies go green : A model of ecological responsiveness », Academy of Management Review, Vol.43, N° 4, pp. 717-736.
Browaeys L. (2020), L’entreprise responsable et vivante, Terre Vivante Editions.
Capron M., Quairel-Lanoizelee F. (2016), 3ème édition, La Découverte.
Lépineux F. et al. (2016), La RSE – La responsabilité sociale des entreprises – 2e éd. – Théories et pratiques: Théories et pratiques, 2016/
Louppe, A. et Rocaboy, A. (1994), « Consumérisme vert et démarche marketing », Revue Française de Gestion, N° 98, Mars-Avril-Mai, 1994, pp. 36-46.