La crise sanitaire a contraint les organisations a reconsidérer en profondeur leur modèle économique qui n’épargne pas les marchés du conseil en stratégie d’entreprise. Alors que les entreprises vont chercher à supprimer les budgets non essentiels et que les clients vont faire pression pour tirer les prix vers le bas, les métiers du conseil sont contraints d’évoluer pour s’adapter aux nouvelles caractéristiques du marché.
Le digital avait déjà incité les actions de conseil à revoir la proposition de valeur. Il est vrai que généralement, la réflexion stratégique anticipe et oriente l’action. De manière plus fine, lorsque l’on parle de stratégie d’entreprise, on entend des prises de décisions ou des axes de réflexion servant les objectifs (croissance, rentabilité, moyen, concurrence), les activités et les zones géographiques d’implantation, les investissements majeurs à engager (en marketing, en ressources humaines, en recherche et développement), en positionnement par rapport aux concurrents principaux (fusion acquisition, alliance). La stratégie est donc un levier indispensable pour son développement et sa réussite et il serait fastidieux de répertorier l’ensemble des questions de stratégies d’entreprise rencontrés par les managers.
L’arrivée du digital perturbe considérablement le contexte entrepreneurial parce que plusieurs technologies modifient les formes de concurrence et ouvrent de nouvelles perspectives en termes de productivité. Partant, ces outils technologiques de rupture comme l’intelligence artificielle, les objets connectés, la blockchain ou encore le big data modifient le marché et la concurrence. Aussi, trois ressorts structurent désormais la stratégie.
Le premier ressort est l’interconnectivité des clients grâce aux réseaux sociaux permet une collecte et une exploitation des données pour mieux les connaitre, maitriser leur mode de décision. Pour trouver les informations recherchées en un minimum de temps, il est indispensable d’avoir des outils pour s’y repérer. C’est le second ressort de la stratégie. Les comparateurs en ligne et les recommandations propulsés par des algorithmes permettent de segmenter finement une clientèle et proposent aux clients le produit qui leur plairont le plus. Le stockage de données est enfin le troisième ressort. La donnée est le nouvel or noir. Stockée et exploitée, elle devient le levier marketing le plus sûr.
Ces trois ressorts ont considérablement structuré la stratégie d’entreprise. Ces évolutions technologiques ont modifié les comportements des consommateurs et partant la stratégie d’entreprise. Les données récoltées ne sont plus déclaratives mais réelles, éprouvées et vérifiables. Les innovations technologiques influencent les pratiques d’achat et ainsi la stratégie d’entreprise.
Dans ce contexte, les cabinets de consulting dont la spécialité est la stratégie d’entreprise peuvent envisager d’adapter leur business model et leur chaine de valeur pour adapter la promesse de valeur des entreprises à la demande des clients. Le marché du conseil en entreprise est devenu plus mature. L’importance du retour sur investissement est significative. Les entreprises se tournent vers les cabinets pour proposer des solutions opérationnelles et innovantes à des problèmes complexes avec l’arrivée des nouvelles technologies. Les problématiques posées par les entreprises sont donc transversales, complexes et touchent à l’ensemble des briques de valeur des entreprises (tech, R & D, RH, marketing…). Ainsi, pour rester compétitif, les cabinets de consulting proposent donc, en conséquence avec l’arrivée du digital, une offre globale depuis l’approche stratégique à la mise en place opérationnelle des différents axes en passant par la conduite du changement pour traiter la partie exécution au cœur même des organisations. L’expertise en stratégie d’entreprise devient donc connexe avec le marketing, le digital, les ressources humaines, le management, la formation des équipes.
La seconde conséquence est aussi la concurrence entre les cabinets de consulting et les groupes de communication. En effet, ces derniers ont développé depuis plusieurs années une offre de conseil en digital pour faire aligner la stratégie d’entreprise avec l’innovation, la vision marketing et les relations commerciales tous poussés par l’utilisation du digital et de la tech et peuvent proposer à leurs clients une intervention de conseil basée sur la transformation de la chaine de valeur. Les agences de communication ont dans ce domaine plusieurs atouts : d’abord une capacité à proposer des solutions adaptées et innovantes pour capturer la valeur visée par l’entreprise, ensuite une connaissance fine des publics basée sur un réflexe de planning stratégique et une habitude d’anticipation des besoins des cibles en prenant en compte les évolutions de notre société et enfin un portefeuille client dont les business est nécessairement atteints par les conséquences de la crise. Ces atouts permettent aux agences de communication de pouvoir mettre en perspective leurs compétences en innovation pour proposer des modèles d’affaires émergents qui combleront plusieurs espaces stratégiques restés vierges. Le modèle de Germinal, agence de growth hacking est à ce titre un modèle à retenir.
Aussi, le covid a finalisé les changements structurels que la révolution digitale avait initié afin de ne pas se laisser dépasser par des acteurs plus agiles comme les groupes de communication. Pour mener à bien leurs missions, ils doivent se doter de profils plus variés (UX, data, IA, développeurs, designers) aux origines variées (ingénieurs, école de commerce, écoles spécialisées), de profils expérimentés comme de séniors, d’une culture d’entreprise rendue plus souple et adaptable avec le covid, d’une plateforme de marque plus innovante et d’un business model garantissant une diversification des revenus (honoraires, abonnement, plateforme, actionnariat, prise de participation…) où le conseil s’intègre dans une offre de service plus variée (formation, accompagnement d’entreprise, product management, growth hacking…).
Dans cette configuration, ce modèle d’agence hybride, accélérée par le covid, le conseil en stratégie d’ entreprise doit évoluer vers une organisation hybride entre l’accompagnement dans la création d’entreprise et leur transformation digitale. Ils touchent ainsi des cibles plus larges allant du grand groupe, la TPE/PME ou encore la start up. Leur proposition de service se structure autour de la proposition programmes d’accélération susceptibles de s’adapter aux différentes configurations de problèmes stratégiques rencontrés par les entreprises : un programme d’accélération d’entreprise (avec la location d’espaces de co-working), un programme de formation pour favoriser l’upskilling de leurs « accompagnés », un programme d’événements pour garantir la médiatisation des projets.
Références
Timsit, J-Ph. (2020), Stratégie digitale, Vuibert.
Meier O. (2018), Diagnostic stratégique, Dunod.
Jolly D. (2012), Stratégie d’entreprise, Maxima.
Giboin B. (2019), La boîte à outils de la stratégie, Dunod.