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Réforme de la haute fonction publique : vers la fin des corps d’inspection

La création, au 1er janvier 2022, du corps des administrateurs de l’État s’accompagnera de la mise en extinction de quatorze corps existants. Les administrateurs civils et les conseillers économiques intégreront le nouveau corps interministériel. Au 1er janvier 2023, les membres de plusieurs corps existants qui en auront fait le choix pourront devenir administrateurs de l’État. Il s’agit des préfets et des sous-préfets, des conseillers des affaires étrangères et des ministres plénipotentiaires, des administrateurs des finances publiques et des corps d’inspection générale.

Dans le cadre de la création de ce nouveau corps des administrateurs de l’État, ces corps de hauts fonctionnaires vont être absorbés et donc mis en extinction, plus aucun fonctionnaire n’y sera recruté, à partir du 1er janvier 2023. Les hauts fonctionnaires du corps d’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR), concernés bénéficieront durant deux ans d’un droit d’option : ils pourront rester dans leur corps d’origine ou intégrer le corps des administrateurs de l’État.

Cette réforme de l’inspection générale se situe dans la continuité de la réforme entamée en 2019 avec la création de l’Inspection générale de l’Éducation, du Sport et de la Recherche (IGÉSR) : une inspection générale interministérielle qui prend ainsi le relais de l’inspection générale de l’éducation nationale (IGEN), de l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR), de l’inspection générale de la jeunesse et des sports (IGJS) et de l’inspection générale des bibliothèques (IGB).

 

Les rôles de l’inspection générale renforcés

La création d’une inspection générale unifiée sur le champ de la jeunesse, du sport et des bibliothèques a pour but de constituer un gage de cohérence dans le contrôle, l’évaluation et le suivi de politiques publiques. La diversité des expertises rassemblées au sein de l’IGÉSR permet ainsi d’articuler mieux encore les politiques publiques. La première mission de l’IGÉSR est de garantir la qualité des services publics par l’évaluation des politiques mises en œuvre et par le contrôle régulier. L’IGÉSR a également vocation à accompagner les réformes et à aider à la transformation de notre pays. Elle a un rôle connexe avec le monde de la recherche, les universités, l’administration centrale, les opérateurs, les instances des ministères et collabore avec les inspections étrangères. Elle doit enfin mener une réflexion prospective sur les chantiers à venir en apportant ainsi une aide à la décision précieuse. 

Composée d’experts reconnus, cette inspection générale renouvelée répond ainsi à l’objectif de rendre plus efficaces les politiques mises en œuvre dans des secteurs prioritaires que sont l’éducation, la recherche, la lecture publique et les sports.

L’IGÉSR est placée sous l’autorité directe du ministre de l’Éducation nationale. Le ministre de l’Éducation nationale de la jeunesse et des sports, ainsi que le ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche et de l’innovation guide son action. Au titre de son activité d’évaluation et d’audit, l’inspection générale et les 14 groupes spécialisés produisent chaque année des rapports tel que par exemple le rapport de l’IGESR N° 131 Juin 2021 sur les  Mécanismes de coordination des acteurs et des démarches en matière de recherche liée à la covid-19.

 

Quel est l’avenir des inspecteurs généraux ?

Cette réforme soulève également de nombreuses questions concernant notamment le statut et les perspectives de carrière pour les membres qui composent ce corps. A la place des inspecteurs généraux, experts reconnus par leurs pairs, ayant une certaine indépendance parce qu’inamovibles, le ministre fera appel à des personnels détachés venus de n’importe quelle administration pour une durée plus ou moins longue : les inspecteurs généraux, qui pouvaient conserver leurs fonctions aussi longtemps que souhaité, seront désormais affectés à ce poste pour des « durées déterminées » à la manière de chargés de missions – qui appartiendront alors au corps des « administrateurs de l’État. » La problématique de leur indépendance figure ainsi dans les enjeux à résoudre. L’inspection comme contre-pouvoir va être très affaiblie. On n’aura plus un inspecteur nommé par un corps d’inspecteurs. Mais une personne nommée à titre personnel pour une mission temporaire.

Ce corps devrait toutefois être plus attractif, plus ouvert à la promotion interne et favorisera le développement de compétences et des parcours plus diversifiés.

Une véritable gestion des ressources humaines sera également mise en place afin d’être plus stratégique et davantage individualisée. La délégation interministérielle à l’encadrement supérieur de l’État (DIESE), qui sera créée en janvier 2022 devra ainsi offrir, en lien avec l’ensemble des ministères, de meilleures conditions d’accompagnement des cadres supérieurs dans une logique d’évaluation et de mobilité.

L’objectif de la réforme est de permettre davantage de souplesse et de mobilité au sein de la haute fonction publique. Cette modification en profondeur de l’État est la plus importante conduite depuis 1945.

Références
Pissaloux J.-L. (2015), Les inspections générales au sein de l’administration française : structures, fonctions et évolution, Revue française d’administration publique, 3 (N° 155), pages 601 à 622.

Marine Fouquet