Alors que la pandémie de la COVID-19 fait encore rage et que l’humain est mis face à ses faiblesses, ses carences et sa mortalité, les politiques s’essaient à la quadrature du cercle : sauver l’économie, sauver les vies, sauver l’éducation, sauver les générations futures, sauver les générations passées, sauver le petit commerce etc… et penser l’avenir !
300 d’économies classique et néoclassique ont bercé les chevets des grandes périodes de croissance montrant que le « laisser-faire » était la solution à la production de la richesse et en corollaire à la base de la croissance, l’intervention publique se réduisant au mieux au statut de gardien de nuit, le léviathan devant à tout prix rester sous contrôle et ne pas devenir le tyran de la gouvernance.
La crise de 1929 est venue bousculer cet édifice, John Maynard Keynes montrant pour la première fois le rôle de l’État et de la monnaie (objet inexistant de la pensée classique) dans la question de la production de richesse. Il ne s’agit plus de croissance, mais de relance de l’économie.
Presque 100 ans et une bonne dizaine de crises plus tard, nous sommes face à une crise sans précédent à la fois dans ces dimensions géographiques, sanitaires, humaines et économiques. Alors qu’après 15 ans de déclin, l’industrie française commençait à reprendre des couleurs (période 2016 – 2019), représentant 12,4% du PIB (contre 23,4% en Allemagne), la crise sanitaire met le secteur à nouveau à mal, en particulier à cause de la chute des investissements productifs. Aux États-Unis, le question du chômage et de la quasi-absence de l’État Providence laisse planer un doute sur le niveau de la demande. Keynes repointe les bout de son nez, en donnant un véritable rôle d’acteur économique à l’État : comme les ménages, comme les entreprises, l’État doit augmenter ses dépenses pour soutenir la consommation et l’investissement des entreprises.
Dans ce registre, fin juillet 2020, 470 milliards d’euros avaient été mobilisés, dans le cadre du plan de soutien élaboré par le Ministère de l’économie, des finances et de la relance. Les plans de soutien sont ponctuels et doivent permettre de passer la tempête. Ils ne restaurent pas la confiance des agents économiques dans l’avenir. Le plan de soutien doit s’accompagner d’un plan de relance dans la durée, dotant le pays de perspectives de croissance, synonymes d’emplois, de création d’entreprises…
En restant dans la lignée des politiques Keynesiennes, mais en donnant un rôle plus stratégique à l’État , Romer et Lucas, et les auteurs de la Croissance endogène vont plus loin : l’État doit aussi investir dans l’accumulation de capitaux de différentes formes : le capital technologique, en soutien à l’innovation et au progrès technique ; le capital public, par le développement des infrastructures de transport et de télécommunication et enfin le capital humain, au sens de Gary Becker, c’est-à-dire les connaissances et compétences, qui découle d’un apprentissage sous forme de formation, qualification et naturellement de la valorisation de l’expérience. La théorie de la croissance endogène considère en effet que la croissance économique est générée au sein d’un système comme résultat direct des processus internes. Plus précisément, cette théorie considère en particulier que l’amélioration du capital humain d’une nation conduira à la croissance économique par le développement de nouvelles formes de technologie et de moyens de production efficaces et efficients.
Cette théorie insiste donc sur le fait qu’il est possible de maintenir un taux de croissance par l’investissement dans des processus internes (le capital humain, l’innovation et le capital d’investissement) plutôt que par le recours à des forces externes « incontrôlables », remettant ainsi en question la vision de l’économie néoclassique. On retrouve ces principes de la politique publique dans le plan France Relance : en parallèle du plan de soutien, 100 milliards d’euros, soit ⅓ du budget annuel de l’État sont dévolus au plan de relance. Le plan de relance présenté en septembre 2020 (#Francerelance) s’inscrit dans cette logique puisqu’il s’agit aussi de penser la France de 2030. Le plan de relance porte sur l’écologie ( 30 mesures , 30 milliards) ; la compétitivité (14 mesures, 34 milliards) et la cohésion (51 mesures, 36 milliard).
L’action publique ainsi organisée nous parait s’inscrire dans les principes centraux de la théorie de la croissance endogène : les investissements en capital, en particulier dans les infrastructures et les investissements dans l’éducation, la santé et les télécommunications, augmentent ; l’investissement du secteur privé dans la R&D est soutenue et montrée une source cruciale de progrès technologique ; l’investissement dans le capital humain est un élément essentiel de la croissance ; il s’agit d’encourager l’entrepreneuriat comme moyen de créer de nouvelles entreprises et, enfin de compte, comme source importante de nouveaux emplois, d’investissements et d’innovation.